Par Alex Lapointe
Expert-conseil
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Le but premier de conserver les fourrages dans un environnement dépourvu d’oxygène est d’augmenter la durée de conservation de ceux-ci par le biais de la fermentation. Ce processus a été et est encore aujourd’hui utilisé pour conserver des aliments tels des légumes ou des fruits. Qui n’a pas déjà mangé de la choucroute ou un bon fromage vieilli de plusieurs années ? Le processus de fermentation permet aussi d’augmenter la digestibilité des fourrages et ainsi d’obtenir de meilleures performances de production. À partir du moment de la mise en entreposage du fourrage frais, les risques reliés à la production de gaz apparaissent. Que ce soit l’inhalation du dioxyde de nitrogène qui au contact de l’humidité des poumons se transforme en acide et risque de causer un oedème pulmonaire ou la perte de conscience entraînée par le dioxyde de carbone ayant pris la place de l’oxygène, les situations sont multiples et peuvent même causer la mort.

Types de gaz
Le dioxyde de carbone est formé par le processus de fermentation dans tous les types de silos. Il est toutefois un produit prédominant de la fermentation en silo hermétique et contribue à garder la qualité nutritive du fourrage. Dans un monde utopique, le dioxyde de carbone serait seulement produit au moment de la phase aérobique (consommation de l’oxygène par les bactéries) et sa concentration se maintiendrait tout au long du processus d’entreposage. Une production de CO2 pendant la phase anaérobique indique la majorité du temps une perte de matière sèche du fourrage et donc inévitablement des pertes économiques pour l’entreprise. Bien qu’une forte concentration de CO2 puisse être dangereuse pour l’humain, créant un manque d’oxygène causant l’asphyxie ou la suffocation, une ventilation adéquate contribuera à dissiper le CO2.

Le deuxième gaz potentiellement dangereux pour l’humain est sans aucun doute le dioxyde de nitrogène. Celui-ci est produit par la dégradation des nitrates contenus dans les fourrages frais en nitrite (NO -). Les nitrates sont normalement utilisés par la plante pour produire des protéines. En condition normale, les nitrates sont presque automatiquement convertis en protéines. Toutefois, en présence de stress (sécheresse, grêle, gel, forte fertilisation en azote) une accumulation de nitrates dans la plante est possible, principalement dans le bas de la plante. Lors de la fermentation, plusieurs acides sont libérés lors de la dégradation de plusieurs composés chimiques par les bactéries et entraînent donc une acidification du milieu. Le Nitrite est chimiquement instable en condition acide et s’agencera à des ions oxygènes pour se stabiliser. Plusieurs oxydes de nitrogènes en résulteront, dont celui qui s’avère dangereux, le dioxyde de nitrogène (NO2). Le dioxyde de nitrogène est caractérisé par une couleur brunâtre et une légère odeur de javel. Les ensilages fermentés ayant produits du dioxyde de nitrogène ont parfois une teinte plus jaunâtre. Il est toutefois primordial de mentionner que ce gaz peut aussi être transparent et inodore. Contrairement au dioxyde de carbone, une petite concentration de dioxyde de nitrogène peut être très dangereuse pour l’humain. Pour le dioxyde de carbone on parle d’un ressentiment de malaise à environ 15 000 ppm (FSIS USDA), tandis que pour le dioxyde de nitrogène certains symptômes irréversibles apparaîtront a aussi peu que 100 ppm après une exposition d’une minute seulement (INERIS, 2004). Une concentration d’environ25 ppm pourra cependant causer un certain inconfort se traduisant par une irritation des yeux et/ou du nez. Le délai pendant lequel un oedème pulmonaire peut se créer suite à l’exposition à ce gaz peut aller jusqu’à 48 h (CNESST, 2017). Il est donc très important d’être au repos et suivi de près par une équipe médicale pour éviter les complications. Ce gaz peut aussi être dangereux sur le long terme, car il peut causer la maladie des silos qui peut survenir par de faibles concentrations de dioxyde de nitrogène dans le silo.

Quelle que soit la cause de la production de gaz dans les silos, qu’ils soient désirés ou non, il est d’une importance capitale de prendre toutes les précautions possibles, lorsqu’il est temps de travailler avec des fourrages frais dans un environnement fermé. Le premier réflexe devrait être de ne pas pénétrer dans cet environnement pendant la période de fermentation active. Cette période varie d’un fourrage à l’autre ainsi qu’avec le type d’entreposage utilisé. S’il est nécessaire d’entrer dans cet environnement, il est primordial d’utiliser les équipements de sécurité recommandés.